Encore un Bobin, encore une pépite, encore un livre que je n’aurai plus la chance de découvrir.
Cet homme a une façon d’agencer les mots qui nous rend beaux. Il fait de son œuvre un voyage poétique où tout se mélange et où rien n’est pareil. Quelques lignes au milieu d’une page blanche et le monde s’ouvre, ses contours sont plus nets, la joie peut enfin entrer.
Je suis en même temps envieuse et reconnaissante. Je dévore ses traits de lumière, j’en saisis un au vol et le laisse aussitôt pour accueillir le suivant, tour à tour abreuvée, assoiffée, abreuvée…Une sorte d’art de la fugue littéraire, un sommet de virtuosité et d’artisanat, Christian Bobin, Meilleur Ouvrier de France catégorie « minuscules ».
Je me promène partout avec lui. Je donne de ses nouvelles à l’escargot baveux qui court vers mes salades, à la fourmi obstinée qui monte le long du mur,
Le chant d’aujourd’hui – “La Présence Pure” (Rhapsodie 1)
Elle était à Marseille, la ville de son enfance et se laissait envahir par la beauté éternelle du vieux port. Elle avait marché toute la journée guidée par son instinct, une odeur, une couleur. Elle avait grimpé jusqu’à la Bonne Mère et avait dévalé les marches de Saint-Charles. Assise sur un banc, elle goûtait enfin un repos mérité au cœur de la vieille ville, la main plongeant dans le cornet sucré des navettes de Saint-Victor encore chaudes. Les reflets changeants du soleil couchant teintaient de rouge les forts Saint-Jean et Saint-Nicolas et zébraient la mer de souvenirs enfouis. Elle eut soudain envie d’aller serrer dans ses bras Lisa.
Elle sonna, sonna et sonna encore. Personne ne répondait. Le besoin était si fort en elle, qu’elle décida de rompre un silence de dix ans et d’appeler Valérie.
– Allo, c’est moi, Hélène. Je suis en bas de la maison de ta mère mais personne ne répond.